« Vie Ma Vie » au cabinet (séance 5)
Session du samedi 18 novembre 2023 de 16h00 à 17h00
Modérateurs : Pierre Lantelme et Nicolas Lellouche
Découverte d’une extrasystolie ventriculaire : quel bilan réaliser ? quand confier au rythmologue ?
«La découverte d’une extrasystolie ventriculaire est un motif de consultation relativement fréquent. Elle peut être fortuite lors d’un électrocardiogramme systématique en ville, ou alors orientée par la présence de symptômes. La prise en charge consiste à recueillir l’histoire familiale, les symptômes du patient, localiser l’extrasystolie (et notamment reconnaitre une origine infundibulaire) ainsi qu’à la réalisation d’un bilan minimal visant à éliminer une cardiopathie. Ce bilan initial peut être complété d’examens complémentaires, notamment l’IRM cardiaque, dès que le moindre doute existe sur la présence d’une cardiopathie ou si la présentation est atypique. Le recours à l’avis rythmologique peut être assez facile pour aider à la localisation des ESV et discuter de la prise en charge du patient. Chez les patients asymptomatiques présentant une extrasystolie ventriculaire idiopathique de charge > 10% et en l’absence de cardiopathie, une surveillance régulière doit être mise en place. En présence de symptômes, une ablation peut être indiquée d’emblée (origine chambre de chasse VD notamment) ou en cas d’échec du traitement médicamenteux. En présence d’une altération de la fonction systolique VG et d’une charge en ESV > 10% une ablation doit être envisagée s’il n’y a pas d’autre cause retrouvée à la cardiopathie ou si les ESV aggravent la cardiopathie.»
Adrien Carabelli, CHU Grenoble Alpes, 38043 GRENOBLE Cedex 09
Amylose cardiaque : particularités des arythmies et de leur prise en charge
«Nous nous focaliserons sur les arythmies atriales, qui sont très fréquentes chez les patients avec amylose TTR ou AL : environ 60% des patients. La FA est d’autant plus fréquente que le stade de l’amylose est avancé mais son pronostic est incertain (probablement car patients déjà très graves).
Concernant le traitement anticoagulant : on recommande de suivre les guidelines de la FA mais ce sont des patients à haut risque thrombotique et hémorragique. Taux de thrombose auriculaire gauche élevé en cas d’ETO ou scanner cardiaque avant cardioversion : environ 20% vs. 2.5% dans une population standard. Il est donc recommandé de rechercher le thrombus OG systématiquement chez les patients avec amylose cardiaque avant cardioversion même si l’anticoagulation est efficace.
Concernant les traitements anti-arythmiques, les médicaments sont limités à l’amiodarone, possible essai des bétabloquants mais souvent mal tolérés. Taux de succès sous amiodarone comparable à une population normale. Taux de succès de l’ablation de FA plus faible car oreillettes très pathologiques avec substrat arythmogène étendu. Dans les formes peu avancées de FA paroxystique ou persistante possible tentative d’ablation, sinon ablation du NAV avec PM.
A noter que ces patients sont sensibles à la FC et il est recommandé de régler une FC plutôt élevée, FC min entre 70 et 80/min.»
Nicolas Lellouche, Hôpital Henri Mondor, 94000 Créteil
Premier accès de FA chez un patient : dois-je le confier d’emblée au rythmologue?
«Dois-je le confier d’emblée au rythmologue ? Pas tous évidemment, car avec 600 000 français fibrillants pour 300 ou 400 cardiologues spécialisés en rythmologie interventionnelle, une consultation systématique risquerait de paralyser gravement nos salles d’attente.
Mais dans le même temps, on nous vante les vertus de l’ablation, d’autant plus efficace qu’on intervient tôt, avec l’impression que ces solutions interventionnelles se banalisent au fil des progrès technologiques, même si l’on a bien compris qu’on obtiendrait jamais plus de 70 ou 80% de bons résultats et que les complications graves n’avaient pas disparu.
De leur côté, les recommandations pour l’ablation (ESC 2020) ne précisent aucune limite d’âge, d’ancienneté de l’arythmie ou de degré du remodelage atrial, laissent une marge de manoeuvre considérable entre abstention, médication, cardioversion ou ablation.
Alors, intervient-on parfois trop tôt ?
Sinon, quel est le moment idéal, de quels critères dépend-il ? Faut-il un rythmologue pour le savoir ?
Et s’il est un peu tard, que faire ? Renoncer, ablater encore et toujours ou revoir les bénéfices à la baisse ?
Mais surtout… ces patients fibrillants ne peuvent-ils n’être gérés que par un rythmologue ou faut-il aussi les confier à un cardiologue ?»
Jérôme Lacotte, Institut Cardiovasculaire Paris Sud, 6 Avenue du Noyer Lambert, 91300 Massy
L’impact de la nouvelle cardiologie numérique sur votre/notre pratique quotidienne, réflexions et suggestions
«L’arrivée dans notre pratique aussi bien hospitalière qu’ambulatoire de technologie d’enregistrement et de télésurveillance des pathologies cardiaques, modifie profondément notre activité et va la transformer.
L’apport de l’intelligence artificielle devrait augmenter notre puissance diagnostic mais peut aussi créer de nouveaux problèmes et limites.
Les patients deviennent proactifs et se rendent à la consultation avec des données dont la fiabilité et la pertinence est parfois difficile à contrôler.
Une partie de ces données, non validées par des études, est parfois très perturbante et nous conduit à des dilemmes diagnostics thérapeutiques difficiles.
Ces technologies apportent leur lot d’interrogation médicolégal et pour beaucoup d’entre elles il y a un vide juridique et assécurologique.
Ces données qui s’accumulent sur nos e-mails et nos téléphones portables font parfois penser à nos patients que nous sommes disponible 24h/ 24h et 365 jours/an !
Elles génèrent des interrogations et des anxiétés nouvelles chez nos patients.»
Jacques-Thierry Metzger, Clinique des Grangettes, Chemin des Grangettes, 7 1224 – Chêne-Bougeries, Genève, Suisse
Conclusion du séminaire
Pierre Lantelme